Femmes et hausse des frais

Comment la hausse des frais attaque-telle directement les femmes ?

L’accès à l’éducation a toujours été l’un des chevaux de bataille des mouvements féministes. En accédant à l’éducation, les femmes de tous temps et de tous lieux ont pu espérer de meilleures conditions de vie par l’accession à une égalité réelle. Elles ont aussi pu aspirer à la possibilité d’occuper un emploi et d’obtenir un revenu, gage d’indépendance, tout en aiguisant leur esprit critique et en acquérant de précieuses connaissances pour résister mieux à ceux qui les auraient voulues ignorantes et dociles.

La hausse des frais de scolarité universitaires compromet cruellement ce crucial et pourtant fragile acquis des mouvements féministes qu’est l’accessibilité aux études. Cette mesure touche les étudiantes de façon particulière et cela, pas seulement parce qu’elles représentent 60% des diplômé-e-s universitaires.

Une inégalité économique toujours bien existante

Malheureusement, les femmes sont plus pauvres que les hommes. En 2008, les femmes avaient un revenu moyen de 30 100$ par année comparativement à 47 000$ pour les hommes. Si cette comparaison ne tient pas compte des heures travaillées, Statistique Canada concède toutefois que les femmes ne gagnent en moyenne que 83% du taux horaire des hommes. De plus, les femmes occupent, de façon générale, des emplois moins bien rémunérés que les hommes. Même chez les titulaires d’un baccalauréat, pour la période 2000 à 2005, les femmes ne gagnaient en moyenne que 87% du salaire des hommes. Cela signifie que les étudiantes devront travailler plus pour payer les mêmes frais de scolarité et qu’elles devront travailler plus longtemps pour rembourser la même dette! Malgré ces constats décourageants, l’accès à l’éducation devrait plus que jamais demeurer une revendication féministe puisqu’il contribue à diminuer les inégalités hommes-femmes. Par exemple, « plus la scolarité des femmes est élevée, moins le fait d’avoir des enfants, notamment de jeunes enfants de moins de 6 ans, devient un frein à l’emploi, et plus se réduit l’écart entre les femmes et les hommes quant au taux d’emploi ».

Des étudiantes monoparentales au bout du rouleau

La hausse des frais touche aussi particulièrement les étudiantes parce que les femmes sont surreprésentées à la tête des familles monoparentales (près de 80% des cas). La conciliation études-famille n’est pas toujours facile… encore moins s’il faut travailler encore davantage pour payer les frais de scolarité qui ne cessent d’augmenter! En s’inscrivant à temps partiel afin de pouvoir travailler plus et s’occuper des enfants, les parents étudiants se voient privés des avantages sociaux consentis aux étudiants et étudiantes à temps plein et leur aide financière se trouve réduite. Une aide financière qui, par ailleurs, inclut dans son calcul tout montant provenant du gouvernement (dont les mesures visant à alléger le fardeau financier des parents) de même que la pension que doit verser un ex-conjoint ou une ex-conjointe7! Les étudiantes monoparentales sont donc victimes d’inégalités socio-économiques comparativement aux autres étudiantes. Elles le sont aussi par rapport aux étudiants monoparentaux, puisque les familles monoparentales ayant à leur tête une femme ont le revenu total moyen le plus faible de tous les types de familles, représentant 70% de celui des familles monoparentales ayant un homme à leur tête.

La situation actuelle est déjà insoutenable pour plusieurs étudiantes et le gouvernement entend rendre les choses pires encore, compromettant ainsi l’accès de plusieurs femmes à l’éducation. La hausse des frais de scolarité n’est pas une fatalité. Ce n’est ni une nécessité, ni un choix de société. C’est le choix politique d’un gouvernement qui nous dit que l’éducation est un privilège et non pas un droit. Il a tort. Nous nous sommes battues pour obtenir ce droit et nous nous battrons pour le conserver.

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L’Institut Simon de Beauvoir à l’Université Concordia a produit en février 2012 une déclaration traitant spécifiquement de la question de la hausse des frais de scolarité et de son impact sur les femmes. Cette déclaration est disponible ici.