La hausse des frais expliquée

Les étudiant-e-s savent déjà depuis 2010 que le gouvernement Charest prévoyait augmenter significativement les frais de scolarité, mais ce n’est qu’au dernier budget provincial que le montant exact de cette hausse fut dévoilé. Après avoir augmenté les frais de scolarité de plus de 30% en cinq ans (50$ par session), voilà maintenant que le gouvernement libéral passera en deuxième vitesse. À partir de l’automne 2012, c’est plus de 325$ par année qui seront ajoutés à la facture étudiante. Les droits de scolarité évolueront donc comme suit :

Évolution des frais de scolarité (excluant les frais afférents)

Avant les hausses actuelles                      Augmentation par rapport à 2007
2006-2007 : 1668 $                                                 -

Avant les nouvelles hausses
2011-2012 : 2168 $                                                 30 %

Avec les nouvelles hausses
2012-2013 : 2493$                                                  49 %
2013-2014 : 2818 $                                                 69 %
2014-2015 : 3143 $                                                 88 %
2015-2016 : 3468 $                                                 108 %
2016-2017 : 3793 $                                                 127 %

Ces données, déjà alarmantes, excluent toutefois les frais afférents qui augmentent également depuis une dizaine d’années. Le gouvernement ayant clairement indiqué qu’il ne limiterait pas l’augmentation de ces frais, on est donc en droit de supposer que ceux-ci continueront de croître. En2006-2007, les universitaires québécois‑e‑s payaient en moyenne 537 $ par année en frais afférents. Au rythme des augmentations actuelles, la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) prévoit que ces frais atteindront près de 900 $ par année en 2016-2017. La facture totale pourrait donc ressembler à ceci :

Évolution des frais de scolarité (incluant l’évolution estimée des frais afférents)

Avant les hausses actuelles                      Augmentation par rapport à 2007
2006-2007 : 2206 $                                                 -

Avant les nouvelles hausses
2011-2012 : 2890 $                                                 31 %

Avec les nouvelles hausses
2016-2017 : 4700 $                                                 143 %

À terme, cette hausse rapportera 332 millions $ au gouvernement, mais comme une partie sera réinvestie dans le programme des prêts et bourses, le revenu net pour les universités sera de 216 millions $. Cela représente 4,7 % du budget global qui sera consacré aux universités en 2016-2017.

Bonification de l’Aide financière aux études (AFE)

Pour amoindrir l’effet négatif de la hausse des frais, le gouvernement réinvestira 35 % des recettes obtenues par la hausse des frais de scolarité afin de bonifier l’Aide financière aux études (AFE). Au total, c’est 116 millions $ de plus qui seront investis dans l’AFE. Cette bonification sera répartie comme suit :

86 millions $ — Ajustement de l’AFE afin de pallier à l’augmentation des frais de scolarité. Essentiellement, cela signifie qu’une personne qui est déjà admissible au maximum des bourses du programme verra le montant de ses bourses augmenter du même montant que les frais de scolarité.

27 millions $ — Réduction de la contribution parentale calculée comme facteur d’attribution des prêts et bourses. Cette mesure permettra à 18 000 universitaires boursiers ou à 8,4 % des universitaires (sur les 212 208 universitaires québécois en 2016) de recevoir en moyenne 940 $ de plus par année.

3,7 millions $ — Augmentation des prêts étudiants pour ceux et celles qui ont droit à un prêt, mais pas à une bourse. En gros, ceux et celles qui sont juste assez pauvres pour avoir un prêt, mais un peu trop riches pour avoir une bourse (cela inclura 15 000 personnes en 2016) auront droit à un prêt supplémentaire équivalent à la hausse des frais de scolarité.

En somme, la hausse des frais de scolarité ne devrait pas affecter les étudiant-e-s les plus pauvres qui ont accès aux bourses de l’Aide financière aux études, mais les bonifications au régime des prêts et bourses n’élargira pas significativement les critères d’admissibilités. Ceux et celles qui sont actuellement exclu‑e‑s de l’Aide financière n’auront donc aucune aide supplémentaire pour faire face à cette hausse de 143 % des frais de scolarité.

Philanthropie et commercialisation de la recherche

Le plan budgétaire du gouvernement pour les universités compte également sur le développement de nouvelles sources de revenus. D’une part, le gouvernement souhaite stimuler la philanthropie, c’est-à-dire les dons provenant d’organismes privés ou d’individus. D’autre part, il espère que les universités « obtiennent davantage de contrats privés de recherche, et qu’elles commercialisent dans de meilleures conditions les résultats de leurs recherches ». De ces deux pans, le gouvernement prévoit obtenir :

36 millions $ supplémentaires grâce à l’intensification de la commercialisation de la recherche ;

54 millions $ de dons additionnels (soit une augmentation de 50 % en 5 ans du niveau actuel) grâce au développement d’une culture de philanthropie et à la mise en place d’un « fond d’appariement » de 10 millions $ du gouvernement.

Il n’est donc pas question pour le gouvernement de mettre en place des mesures fiscales contraignantes qui obligeraient les entreprises à contribuer à notre système d’éducation et de recherche, duquel elles profitent pourtant largement. L’approche proposée consiste plutôt à transformer la recherche universitaire afin qu’elle corresponde aux besoins du marché et qu’elle soit monnayable.

Investissements du gouvernement

Finalement, le gouvernement prévoit augmenter sa contribution nette (après l’inflation des coûts du système) de 224 millions $ d’ici 2016-2017. Cela représente une augmentation de 7,2 % de la contribution gouvernementale. En terme absolu, cette augmentation est de 35 % inférieure à celle exigée aux étudiant‑e‑s.

Sommaire

Au total, le plan budgétaire du gouvernement pour les universités prévoit 530 millions $ d’argent neuf d’ici 5 ans.

-         L’augmentation des frais de scolarité fournira 216 millions $ (40,7 %)
-       Le gouvernement fournira 224 millions $ (42,3 %)
-         La commercialisation de la recherche rapportera 36 millions $ (6,8 %)
-         La philanthropie dégagera 54 millions $ (10,2 %)

Cet argent neuf sera réparti comme suit :

-         Positionnement concurrentiel des universités (10 à 20 %)
-         Gestion et administration (5 à 15 %)
-         Enseignement (50 à 60 %)
-         Recherche (15 à 25 %)

Pour plus de détails, consultez le document budgétaire sur l’éducation :

http://www.budget.finances.gouv.qc.ca/Budget/2011-2012/fr/documents/Education.pdf